Un chat devenu célèbre



 Projet Charabia

Nous avions adopté un chaton noir et blanc dont notre voisine ne voulait plus. Très vite, il est devenu la mascotte de la maison, et nous l'emmenions en vacances avec nous. Il n'était pas spécialement affectueux, partait dans tous les sens -du coup nous l'avions nommé Charabia. Un chat très égoïste, insolent parfois, par exemple en s'installant sur la table lors du petit déjeuner. Il semblait n'avoir peur de rien, et n'hésitait pas à monter sur les genoux de n'importe qui. Il était tellement beau qu'on lui pardonnait tout. On trouve toujours une excuse pour les stars.

Et puis, un matin, plus aucune trace de Charabia. Nous l'avons cherché partout, en vain. Il avait disparu. Complètement. Il ne restait de lui que les très nombreuses photos prises au fil des ans. Mais une photo, aussi réussie soit-elle, ne remplace pas la chaude présence d'un fidèle compagnon, aussi extravagant eût-il été.

C'était une période durant laquelle j'avais presque cessé mon activité en peinture, rempli de doutes sur le déroulement des expositions, les ventes compliquées, le choix des formats pour éviter l'encombrement dans l'atelier qui est fréquent chez les artistes-peintres. En résumé, j'en avais plus qu'assez. La disparition du chat fut comme un déclic : pourquoi ne pas le faire revivre en peinture ? Je me rendis chez mon fournisseur habituel en toiles et peintures fines, et tombai sur un stock de toutes petites toiles tendues et apprêtées comme les grands formats que l'on achète habituellement.

Ainsi commença le projet Charabia.                       



         
 J'offris les petites toiles partout, dans la famille, aux amis, puis aux gens de rencontre lors des nombreux voyages que nous faisions, en expliquant sur un petit papier glissé dans le minuscule châssis de la toile les origines du projet.

Il trouva son apothéose lors d'un séjour en résidence d'artistes à Sapporo au Japon en 2017. Les Japonais adorent les chats, ils ont même des « Nekko cafés » où se rendent les gens qui ne peuvent avoir un animal dans leur intérieur trop étroit. Je rentrai en France le cœur léger, sachant que le disparu cher à mon cœur était présent un peu partout dans le monde à travers sa représentation démultipliée sur les petites toiles.

Par la suite, je me suis remis à l'écriture durant les confinements liés au Covid 19, puis récemment décidai de reprendre pour une saison le thème de Charabia. Je me sers de Facebook pour l'exposer à nouveau, et il a changé. Nous avons tous changé. J'utilise des feutres noir indélébiles pour le représenter, et les décors sont différents. Parfois, il partage sa toile avec un intrus. Son format est plus réduit, et là, on est au cœur de la pensée pop d'Andy Warhol, lorsqu'il expliquait avant tout le monde l'arrivée d'une autre forme d'art, qui utilise notamment les produits industriels selon leur arrivée dans les magasins.

Cette nouvelle série sera en partie offerte, et parfois vendue. L'idée de départ était de faire réfléchir les gens sur la façon dont sont traités les artistes, pourquoi on n'a pas envie de payer leurs toiles. En ce cas, que signifie un don qui n'a pas de prix ?



Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Françoise Hardy au cercle polaire

Institut Cervantès, lieu unique